mercredi 29 septembre 2010

Une semaine trouée

Salut à vous!

Déjà au milieu d'une bien étrange semaine!
Ça a débuté lundi par un message à l'intercom à 8h30, alors que j'étais en plein milieu de ma planification de la journée, qui nous annonçait que ce serait une journée pédagogique puisque le corps d'un homme décédé la semaine précédente arrivait au village. Je suppose que c'est par respect pour l'homme et pour les villageois qui doivent tous connaîtrent le défunt, mais je ne comprends pas pourquoi on a fait de cette journée une pédagogique au lieu de fermer l'école...

De mon côté, ça a fait mon bonheur puisque j'ai pu m'avancer dans un tas de choses. J'ai pu entre autre: afficher les sons au mur (enfin!), planifier une nouvelle routine de lecture pour chaque matin, planifier mes ateliers de la semaine prochaine. Enfin, je serai un peu en avance et ne planifierai plus pour la journée même!
Susan en pied de bas! :) (avec la fonction quétaine de coeurs)
Le lendemain, mardi, les élèves se sont présentés uniquement en avant-midi puisque les funérailles devaient avoir lieu en après-midi dans le gymnase vu l'absence de chauffage à l'église!

Nous aurions été curieux d'assister à cette cérémonie, mais nous avons convenu que notre place n'y était pas, que comme nous ne connaissions pas cet homme, nous n'avions pas à aller observer la cérémonie. À la place, nous avons profité de cette journée de congé surprise pour siester allègrement.

Saviluk, adorable élève, en pyj'
Aujourd'hui, une journée pleine, mais dans une ambiance décontractée. Pyjama day! Ça a fait du bien de passer une journée entière avec mes merveilleux, sublimes, adorables élèves! Nous avons ralenti la cadence en après-midi, comme l'enseigante d'inuttitut n'y était pas (2 périodes de spécialistes depuis le début de la semaine...sans spécialistes...grrrrrr...ça ne m'aide pas côté planification...je n'ai pas une minute à moi durant la journée! Et cette situation (absence des spécialistes) arrive assez souvent par ici...), nous sommes allés au local d'informatique et à la bibliothèque. Je n'ai jamais vu mes loups si calmes! Ils semblent partager ma passion des revues!
Côté personnel, je tente de bouger le plus possible, car j'ai passé 4 jours en mode sédentarité extrême. La fin de rhume conjugué au temps venteux et à la fatigue font disparaître la belle motivation que j'ai habituellement. Depuis hier, j'ai décidé de sortir de ma torpeur, à moi jogging, Josée Lavigueur et compagnie. D'ailleurs, vous ai-je  dit que chaque matin, avec les élèves, nous commençons la journée par une routine de danse/entraînement/yoga sur un air entraînant d'Arcade Fire (le seul cd que j'ai...). Vraiment une belle façon de commencer la journée!
Tellement venteux qu'on entend les vagues se briser contre les rochers. Ça dort bien!

J'attends impatiemment les cd que je me suis commandés chez Renaud-Bray. Entre autre, un Tricot Machine pour faire chanter mes élèves. C'est mieux que les comptines enfantines du programme...

Nicolas s'est fait une nouvelle amie en la personne de la dame de la poste. Je crois qu'elle le trouve sympathique, ou peut-être obsédé (on va à la poste 2 fois par jour, trop excités de recevoir quelque chose).
Cette semaine, on a été choyé: un dvd de Zip.ca, une boîte de chez Well, pharmacie à Guelph livrant gratuitement et une lettre de Lucie, la maman de Nicolas (merci!!!!). Quel bonheur de recevoir du courrier (je dis ça comme ça...;)  )!

Mode sédentaire: installation de l'ordi pour un film au lit!

Bon, je vais aller déguster l'excellent repas que m'a préparé mon intellectuel d'intérieur préféré! Et oui, Nicolas a terminé son contrat, il commence donc son nouveau contrat: prendre soin de moi (chose qu'il faisait très bien, même en travaillant, dois-je le mentionner!).

 
Bon restant de semaine à vous!
XXXX

dimanche 26 septembre 2010

Une expérience ethnologique

Salut, bande d’impatients !


Assis en face de la belle Marie, à la table de la cuisine, je pitonne sur mon ordi tandis que votre blogueuse préférée fait de même… Nous avons transformé notre salle à manger en mini-salle de presse !

Je commence par quelques petites nouvelles, avant de vous parler de l’expérience ethnologique qui a donné son nom à ce billet.

Tout d’abord, nous avons eu un très beau souper hier, agrémenté d’une délicieuse pièce de caribou. Aloupa, l’un des commissaires de l’école, dont la fille est dans la classe de Marie, nous a gentiment donné deux kilos de caribous il y a quelques semaines, pour nous souhaiter la bienvenue et pour remercier Marie d’être venue enseigner ici. Voilà qui s’appelle un beau cadeau et une belle hospitalité !

La pièce en question était superbe, sans os, et nous avons décidé d’en faire un genre de bourguignon au four. Sauf qu’en enlevant les nervures et le peu de gras qu’il y avait, je me suis rendu compte que nous allions peut-être faire des cubes et massacrer deux kilos de filet mignon de caribou, ou en tout cas d’une pièce qui méritait de meilleurs égards.

Tandis que je sniffais compulsivement la bête en question, pour m’imprégner de ses parfums sauvages (ce qui excédait ma belle), Marie avait une peur bleue qu’on manque de bouffe. Je la rassurais, le couteau de boucher à la main, en arguant que mon œil de lynx voyait là de la nourriture en quantité suffisante pour nos convives. Vous en jugerez par vous-même, en voyant ces photos :




Bref, car il me faut abréger, ma crainte que la viande s’avère coriace n’était pas fondée, elle était au contraire succulente, tendre et goûteuse ! Le tout fut accompagné de bonnes patates pilées, d’une délicieuse salade préparée par Marc-André et Laure, de deux pains frais, dont un aux figues séchées, fait le jour même par Pierre-Luc, de deux bonnes bouteilles de vin, d’une croustade aux pommes savoureuses, de biscuits au chocolat divin (merci Julie !) et d’agréable compagnie ! Oui, on peut dire que nous avons fait bombance, et que ce premier souper en sol « Nunavikois » fut une réussite !

J’ai aussi une bonne nouvelle à vous annoncer : je termine mon remplacement à l’école cette semaine ! Janie, la nouvelle prof au secondaire, devrait arriver cet après-midi. Après une transition de quelques jours, je lui lègue les enfants. Je commençais à m’habituer, je trouvais que petit à petit ils travaillaient parfois un peu, pas trop quand même, quelques dizaines de minutes par jour tout au plus, ils étaient sur le point de faire, peut-être, leur premier apprentissage de l’année, et voilà que je les laisse entre des mains plus compétentes. Mais c’est la vie, que voulez-vous !

Je ne suis pas optimiste, pourtant, pour la suite des choses, car je suis presque certain que du travail m’attend, à l’école, comme remplaçant dans d’autres classes, ou alors ailleurs dans la communauté… Moi qui pensais que le Nord m’annonçait du temps pour écrire et tourner des images, et pour enfin réaliser un de mes rêves, soit celui d’être une personne à charge ! Je suis condamné à l’autonomie, faut croire.

Bon, j’en viens finalement à cette expérience ethnologique. Mardi dernier, une de mes élèves les plus sympathiques, Pasha, m’a invité à aller à l’église pentecôtiste du côté du Northern (c’est le nom du magasin général, d’où l’appellation « Northern side » ou « Coop side » pour désigner un endroit dans Kangirsuk), car le soir elle et d’autres jeunes allaient y danser. Je ne savais pas trop à quoi m’attendre, j’aurai dû me douter que ce serait de la danse à vocation religieuse, mais honnêtement je croyais surtout que les ados se servaient du lieu comme d’un sous-sol d’église ou d’une salle communautaire, pour simplement « chiller ». Yo.

Alors Marie et moi avons pris une marche de santé jusqu’au Northern side, et nous avons trouvé « l’église » (une baraque qui ne paie pas de mine) derrière deux maisons, non loin du parc (un gros rectangle en asphalte). Quand nous sommes entrés dans le vestibule, Marie, fidèle à ses convictions et constatant qu’il s’agissait vraiment d’un lieu de culte, a décidé de rebrousser chemin. Quant à moi, comme j’avais été gentiment invité par une élève et que j’étais curieux, je suis entré dans l’église à proprement parler.

Laura, une de nos collègues, racontait alors quelques épisodes de sa vie (son mariage, pourquoi elle était revenue à Kangirsuk, etc. , sans doute à la demande des jeunes) à une douzaine d’adolescents qui, aussi incroyables que cela puisse paraître ici, l’écoutaient attentivement ! Et ce, pendant une bonne dizaine de minutes ! J’ai tout de suite eu une idée, celle de transférer l’école dans l’église ! Parmi ces fidèles, il y avait une élève de Marie, Saviluk, ainsi que quatre de mes élèves en secondaire 1 ou 2 : Pasha, Janice, Mary et Nancy. Les jeunes avaient entre 8 et 14 ans, je dirais. Laura leur a parlé puis a lu un psaume à ses ouailles. Devant l’autel, il y avait une pile de Bibles pour ados sur le sol, dans des étuis en cuirette sur lesquels étaient inscrits : « Redeemed » ou « Redeem » (rédemption ? le fait d’être sauvé?).

Le décor de l’église était baroque : nous étions dans une sorte de roulotte dont les murs de plywood étaient peints en blanc, avec des chaises confortables, bleues et amovibles. Il y avait, bien sûr, un poêle sur la droite, et derrière, dans une bibliothèque cheapette, des livres à vendre pour édifier la jeunesse chrétienne : « Love and Dating » (sur les vertus de l’abstinence avant le mariage) ainsi que deux ou trois livres d’un preacher afro-américain… Il y avait aussi, si ma mémoire est bonne, des CD de chansons à propos de Dieu et de Jésus dans la bibli. Devant, il y avait l’autel, sur lequel on retrouvait, en plus de l’endroit pour le prêche (j’ai oublié le nom du meuble sur lequel on dépose la Bible et derrière lequel le prêtre se place), une batterie, des instruments de musique, un système de son et un projecteur. Et bien sûr, sur le mur du fond, une croix assez grande, faite de deux morceaux de bois enrobés de papier d’aluminium.

Je reviens à mon histoire. Quand Laura eut terminé de parler, les jeunes se sont, sans surprise, activés… D’abord, Pasha s’est mise à la batterie et une autre fille jouait des accords sur une guitare électrique un peu désaccordée, tandis que les autres jeunes, munis de deux ou trois micros, chantaient en chœur une chanson qui célébrait l’éternité de Dieu et sa force incommensurable, laquelle chanson était projetée sur le mur via une acétate. Inutile de dire que ça faussait mes amis !

Puis la croix en aluminium a été décrochée, et on est passé aux choses sérieuses. Au son d’une chanson soft-rock à caractère religieux, pendant qu’une des ados tenaient la croix bien haut, tous les autres jeunes se sont mis à faire des cercles autour d’elle, en mimant les paroles de la chanson, en s’agenouillant. La chorégraphie était très réussie, comme toutes celles qui ont suivi d’ailleurs. Après deux chansons en anglais, deux chansons en inuktitut ont suivi, dont une à la mélodie assez accrocheuse, sur un genre de musique techno-électro ! Mais ma préférée entre toutes fut celle dont le refrain était « Funky Jesus Music » ! On a aussi eu droit à du hip hop, puisque les ados en sont friands.

J’aurais bien aimé avoir ma caméra pour filmer tout ça, et j’espère que ce sera possible éventuellement de le faire. Pendant que les jeunes dansaient et se recueillaient (car ils ont aussi prié), j’étais souvent perdu dans mes réflexions. Je me disais notamment que les missionnaires avaient fait du sacré beau boulot ici, et dans le Nord en général… Évidemment, les Inuit sont libres de croire en ce qu’ils veulent, et ce n’est pas à moi de critiquer cela. D’un autre côté, il est indéniable que leur croyance en Jésus-Christ est le fruit d’un endoctrinement (d’une conversion forcée ?), le résultat de la rhétorique des missionnaires qui, il va sans dire, a des siècles de succès derrière elle. On est donc ici en présence d’un reliquat de l’impérialisme culturel canadien (et québécois) dans le Nord.

En tout cas, c’est assez particulier de voir des jeunes Inuit, habillés comme n’importe quel ado nord-américain, dont les grands-parents devaient avoir des croyances toutes autres que les leurs, se trémousser au son de chansons chrétiennes. Sans doute que les Inuit étaient, à la base, des gens très croyants, et que le christianisme est simplement venu changer la nature de ses convictions spirituelles.

Il faut aussi dire que dans une société sans repères, où beaucoup d’adultes sont tout croches, où le sens de la vie apparaît incertain, l’église, ses rites, la communion qu’elle suppose, représente pour ces jeunes un havre de paix, un phare dans une communauté pas mal perdue. Leur foi est sincère, et le bonheur qu’ils avaient à se retrouver ensemble, à danser sur des musiques qu’ils aiment, était manifeste.

Je vous laisse cogiter là-dessus…

Nicolas XX








Deux pour le prix d'un

Bonne fin de fin de semaine!

Afin de nous faire pardonner le mutisme de cette semaine, nous publions aujourd'hui chacun un billet. Peut-être y aura-t-il des redites, mais cela permettra de comparer nos deux visions des événements de la vie par ici.  Bonne lecture!

Et bien finalement, nous ne sommes pas partis en camping la semaine dernière. Évidemment, comme c'est la norme ici,  on nous a averti au dernier moment, soit le matin même, que finalement ce serait remis pour cause de vents trop forts. Ma canne de bines était déjà achetée, mais je n'étais pas prête pour autant. Mon corps étant occupé à livrer un combat contre un p'tit rhume de septembre, je n'ai pas été malheureuse de cette nouvelle. Si la température le permet, nous vivrons l'expérience cette semaine.Aucune déception de la part des enfants, ils semblent être habitués à respecter le rythme et les contraintes liées à la nature.

Cette semaine, c'était un peu rock'n'roll à l'école, la directrice étant partie à Montréal. La directrice ne m'a pas donné de nouvelles en ce qui concerne le 20$ que m'a volé le charmant garçon, mais Marc-André, notre collègue qui exerçait les fonctions de directeur remplaçant pour la semaine, a rencontré la maman et lui a raconté les mauvais coups de son fils...Celui-ci semble moins fendant cette semaine. J'ai même eu droit à des excuses de sa part après qu'il ait déchiré sa photo d'une affiche que j'avais réalisée. Ça semblait sincère...


Un cas de "réglé", mais il y toujours des histoires sur la cour de récré. Laissez-moi vous dire que j'appréhende mes tours de surveillance. Par ici, ce n'est pas un petit 15 minutes de joie pour respirer de l'air frais, mais une véritable bataille pour faire respecter les règles et imposer le respect. Dans mon top de la semaine, j'ai du entrer de force une fillette de 2e année qui, non contente de s'être fait confisquer ses cigarettes Popeye, s'est mise à me lancer des roches...Marc-André, avec l'aide d'une traductrice, les enfant de 2e année n'ayant que des cours d'inuttitut, lui a expliqué qu'elle ne pouvait faire cela et à la fin des cours, elle est montée à ma classe pour récupérer sa friandise avec son grand sourire. L'histoire était oubliée et le lendemain, j'avais droit à ses grands sourires et à ses bonjour!

Ma belle gang d'après-midi (les 4e et 5e année)

Ensuite, une histoire qui se termine un peu moins bien...Depuis que j'ai confisqué un pepsi à un garçon du secondaire, celui-ci tente de m'intimider par son regard fixé sur moi, des paroles en inuttitut qu'évidemment je ne saisis pas et des "speak english" quand je parle en français à mes élèves. Aussi, lui et sa gang font mine de me cracher dessus. Bien que cette situation soit inacceptable, il n'y a pas grand chose que je puisse faire contre eux. Je n'embarque pas dans leur jeu, je continue à les saluer à la Coop, à les avertir lorsqu'ils enfreignent les règlements. Ce garçon est plus souvent qu'à son tour dans le bureau de la directrice, à part le suspendre, que peut-on faire? En plus que la suspension par ici est peut-être plus perçue comme une récompense pour les enfants...Les exclure de l'école n'est sûrement pas la solution!
Heureusement, j'ai des élèves formidables dans ma classe qui me font oublier cette violence. Cette semaine, j'ai remarqué que le français était de plus en plus présent dans la classe "Écris ton nom", "Fais de l'espace dans la ligne", "Est-ce que...". Au début de l'année, j'entendais uniquement de l'inuttitut entre les murs de la classe, maintenant, les élèves semblent avoir le désir de s'améliorer en français, ils osent essayer et c'est une grande réussite pour moi! :)


Nous travaillons toujours très fort les habiletés sociales. Cette semaine, une capsule "répondre à une salutation" a fait l'objet de mon enseignement. J'essaie également de donner des trucs pour se calmer aux élèves "presto" qui utilisent la violence dès qu'une situation les dérange. Lentement, mais sûrement!
Outre l'école, la vie par ici s'écoule lentement et dans le bonheur. Les journées sont encore belles, les températures oscillent entre 5 et 10 degrés, les vents sont plus présents, jamais de longs épisodes de pluie, seulement  de courtes ondées occasionnelles. Nous avons droit pratiquement tous les soirs à des ciels rosés ou de feu, au bruit des vagues lorsque le vent souffle assez fort. Il ne nous manque rien, sauf la présence de ceux qu'on aime (...et aussi bientôt du vin...:) ). Bref, on est heureux.


Ma Presse du samedi, devant l'eau agitée par les vents

J'aurais aimé vous parler du souper caribou qu'on a organisé hier soir, mais apparemment, ce sujet a été réservé par l'homme...Je le laisse donc vous relater notre excellent souper!


Deux femmes comblées

lundi 20 septembre 2010

De l'aventure à l'horizon!

Bon début de semaine à tous!

Ah que la fin de semaine a fait du bien! C'était parfait! Vendredi, on a débuté le bonheur en débouchant une de nos très rares bouteilles de vin, donc nous avons bien savouré chacune des gorgées. Samedi, après une séance de jogging conjuguée à une séance photos des beaux paysages automnals du village, nous nous sommes dirigés chez Julie pour une soirée sud-américaine. Occasion merveilleuse d'essayer la recette de croquettes de feta et courgettes qui m'a fait saliver la veille à la Distasio! Bandeaux de hippies, colliers, pantalons péruviens et surtout plein de bonne nourriture et de musique entraînante. Dimanche, après-midi Scrabble où j'ai battu de peu mon beau brun...pas planté, mais...299 à 288...et ce, en essuyant un Scrabble (laissera) en tout début de match. On voit ici ma combativité et ma persévérance! :)



Ce matin, joyeux retour au boulot. Je m'en doutais déjà, mais aujourd'hui, ça m'a frappée de plein fouet: mes élèves ne savent pas lire...2 sur 14 peuvent lire des phrases, 2 autres des mots...et les 10 autres ne maîtrisent pas encore toutes les lettres. Du pain sur la planche vous dites? Je me suis donc permis un petit discours (imaginez ici une prof moralisatrice qui tente de faire passer son message à l'aide d'expressions exagérées, de mimes, d'imitation, vu la faible compréhension orale des élèves...) afin de leur rappeler l'importance de savoir lire, ne serait-ce que s'ils veulent dans le futur travailler à la Coop! J'ai eu droit à quelques élèves qui m'ont affirmé qu'ils désiraient étudier et peut-être même travailler (un petit...signifiant un peu...) à Montréal. Une fois mon discours terminé, j'ai vu des élèves qui essayaient de faire les sons avec moi: ppppp-an-ttttttttt-aaaaaaa-lllll-on. Encore faut-il expliquer ce qu'est un pantalon! Nicolas, les collègues et moi, nous questionnons souvent sur la difficulté supplémentaire que représente l'apprentissage d'une 3e langue, pratiquement non parlée au village, pour ces jeunes élèves. Bien que je sois une fervente défenderesse de la langue française, je réalise que le système ici ne favorise pas la réussite. Réflexion à poursuivre...



Un peu avant le dîner, Tommy, le directeur de centre, est entré dans la classe avec des formulaires pour les enfants: "excursion in canoe september 23 -24, destination Up river"...Première nouvelle! Ça a bien l'air qu'on s'en va en classe verte jeudi et vendredi! J'ai donc couru pour avoir un peu plus d'informations...Eeeee...Tommy, do I go too? Yes! Ok...What do I need. Sleeping bag, food, warm clothes. Ok!
Voilà! Pas plus compliqué que ça...Et dire qu'organiser un voyage à Montréal nous demande des heures! Ici, 3 heures de chaloupe sans veste de survie ne semble énerver personne...sauf moi!



Alors, je risque de revenir vendredi avec un super billet pour vous!
C'est Nicolas qui devra accueillir le technicien Bell jeudi. Papa, Kim, Lucie, les soeurs, à nous les conversations téléphoniques dans quelques jours!

J'avais dit un petit billet. Je m'arrête et m'en vais regarder le documentaire "Première année" à Télé-Québec sur les premières années (ça le dit!) d'enseignement des jeunes profs.

Bonne semaine les amis!

samedi 18 septembre 2010

Un nouveau centre d'entraînement au village!

Bon samedi!

Un belle journée de congé toute brumeuse pour se reposer, écrire des courriels et, au grand malheur de Nicolas, faire des muffins aux pépites de chocolat! J'ai tellement envie de popoter du confort food ici, et plus particulièrement des desserts!!!



La semaine semblait se terminer d'une façon agréable hier. Rob, le prof de gym est passé dans ma classe un peu avant le début de la journée pour savoir si je verrais un inconvénient à ce que mes élèves aient 4 périodes de gym durant la journée afin d'organiser un tournoi de touch ball. Ma planification du vendredi (arts plastiques, film et contenu pédagogique, évidemment!) a donc pris le bord au grand plaisir de mes élèves. Je croyais avoir bien peu de marmots dans la classe suite aux épisodes de poux et de congé forcé de la veille. J'ai eu le plaisir d'accueillir 10 de mes 14 élèves. Vite, vite, vite, nous nous mettons à la confection d'affiches pour encourager les 3-4-5 français (traduction de Go! Go! Go! = Allez-y les 3-4-5 français!), nous mangeons une collation surprise de salade de fruits et nous nous dirigeons au gymnase pour une séance de touch ball. Beaucoup de plaisir, malgré notre défaite.



Malheureusement, la journée s'est terminée sur une note négative. J'ai omis de vous mentionner cette semaine que durant une surveillance sur la cour, un élève m'a causé du trouble. Tentant de faire respecter le règlement concernant les sucreries à l'école, j'ai sommé quatre garçons de consommer leur boisson gazeuse ailleurs que sur le terrain de l'école. Je ne m'attendais pas à ce qu'ils obtempèrent sur le coup, mais la violence de leur réplique m'a tout de même ébranlée. Un garçon ayant terminé sa boisson a lancé la canette à mes pieds, les autres se sont écartés en me riant au nez pendant qu'un autre, dans mon dos, m'a poussé (pas fort, mais tout de même, je n'ai pas apprécié ce contact physique...). Une autre enseignante est venue me donner un coup de main, mais c'était en vain...Les garçons sont montés dans un module de jeux, se sont mis à cracher par terre, à nous narguer. L'enseignant de gym, présent depuis 2 ans a donc été appelé en renfort. Il a "maîtrisé" l'élève le plus turbulant et l'a poussé à me présenter des excuses. J'ai eu droit à un "sorry" crié les yeux au sol. Robert m'a demandé si ça me suffisait. Considérant la situation et les excuses hypocrites, j'ai considéré que ce n'était pas suffisant. Rob m'a dit qu'il fallait être indulgent, que cet élève vivait des choses difficiles à la maison. Je peux comprendre, mais en même temps, jusqu'où devons-nous tolérer cette violence et cette effronterie? Je suis d'avis que cet agissement était intolérable et que nous devions aller plus loin avec cet enfant, lui expliquer ce en quoi ces gestes ne pouvaient être tolérés sur la cour. Il a donc été amené chez la directrice.

Donc retour à vendredi, au gymnase. À la fin de la joute, on se sert la main. Je serre la main de ce garçon, je le prends même en photo, il est content, me sourit. Quelques secondes plus tard, une élève me dit: "Where's your 20$?". J'avais un 20$ dans ma poche arrière, il n'y est plus...Je demande donc à l'élève pourquoi elle savait que j'avais un 20$. "Bobby took it". Affirmation que mes beaux élèves s'empressent de confirmer. La journée venant de se terminer, certains élèves sont déjà dehors, dont ce cher Bobby. Ma copine Mariève vient me porter main forte, mais nous avons droit à des roches lancées, à des cris, à des refus de venir discuter. C'est donc encore une fois Rob qui vient à ma rescousse et ensuite, le directeur de centre, Tommy. L'élève est amené à l'intérieur, me crie toute sa haine, affirme qu'il n'a pas le 20$, que c'est son ami Davidee. La semaine est terminée, tous sont partis à la maison, l'enquête se poursuivra lundi...Ouf...Je repars à la maison les larmes aux yeux, mais je tente de focusser sur mes élèves si charmants, sur tous ceux qui ont dénoncé ce vol. Je tente de comprendre ce jeune qui en arrache, qui m'en fait arracher, mais j'ai beaucoup de difficulté...

Je réussis tout de même à cesser de penser à cet incident en allant courir avec Nicolas. Quel bonheur que de croiser les élèves et d'être accompagnés par quelques-uns d'entre eux le temps de quelques foulées ou même tout le long du jogging par ma belle Eva qui était absente de l'école depuis 2 jours. Nous poursuivons même l'entraînement à la maison: haltères, étirements. Quel beau moment de bonheur, avec ces élèves qui nous imitent, qui sont heureux.


Même Nanette la chatte participe aux étirements!

Ces moments magnifiques avec les enfants me font instantanément oublier les épisodes difficiles. Je suis toujours heureuse, comblée d'avoir la chance de vivre cette expérience, de côtoyer ces enfants. J'espère sincèrement être capable de faire les bonnes interventions, d'être bien accompagnée par la direction pour arriver à conclure ce malheureux épisode et aider cet enfant si amoché.

Pour poursuivre dans le sujet, à lire dans le cahier Plus de La Presse de ce samedi, un dossier sur les enfants écorchés du Nunavik.

http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/201009/17/01-4316687-scenes-de-la-vie-boreale.php

En terminant, un petit mot pour vous remercier de nous lire! Je suis consciente de ne raconter que des tranches anecdotiques de la vie d'ici, de ne pas aller dans une réflexion plus poussée, mais de raconter ces événements de notre vie me fait un grand bien et me permet de ventiler et de poursuivre mes réflexions.
Sur ce, bon week-end à vous, bon temps des pommes!
Vous me manquez de plus en plus...

jeudi 16 septembre 2010

Un congé forcé

Coucou d'après-midi, chose non-usuelle!
C'est que nous sommes en congé depuis un peu avant midi, malgré nous.

Ce matin, tandisque l'on travaillait, nous avons entendu les sirènes d'une ambulance, bruit beaucoup moins courant que dans notre quartier de Côte-des-Neiges, il va sans dire! Quelques minutes plus tard, dans la salle du personnel, durant la récré, plusieurs profs inuits s'étaient massés autour du poste de radio pour entendre les dernières nouvelles. Une mauvaise nouvelle a été annoncée; la mort d'une femme de la communauté. Dans ce petit village d'un peu plus de 400 âmes, les nouvelles voyagent à une vitesse folle, encore plus vite que les ados sur leur scooter le vendredi soir...En un rien de temps, nous avons appris les circonstances du décès de la femme, soit la violence d'un mari imbibé par l'alcool.

Peu après, la directrice a fait le tour des classes pour annoncer que l'autobus viendrait chercher les enfants et que le personnel était attendu dans la salle des profs. Suite à une prière, on nous a mis au courant de la situation et Nathalie, la directrice, en a profité pour affirmer que l'on se servirait de cette affreuse mort pour sensibiliser la population aux dangers et aux conséquences d'une consommation irresponsable d'alcool.

Plus le temps passe et plus nous sommes au courant de certains problèmes dans la communauté, reliés à l'alcool et à la violence. Quand un élève ne va pas bien en classe, comme cela m'est arrivé avec un élève cette semaine, la violence à la maison ou l'état d'ébriété des parents peut parfois expliquer la situation.

La première réaction des gens suite à cette annonce semble être l'écoeurement de ces problèmes liés à l'alcool. Tandisque nous étions à la Coop pour obtenir un casier postal, faire rétablir notre câble et la ligne téléphonique (oui, nous avons tout eu en une semaine, mais tout lâche un après l'autre!!!), une femme ne parlant qu'inuttitut s'est insurgée, à l'aide de signes et de mimes, de cette situation. Ce que nous avons compris de son "discours" c'est que depuis qu'elle est petite, elle voit l'alcool qui cause des problèmes et elle en a assez, elle veut que les choses changent.

Je ne crois pas que les enfants auront le coeur à l'apprentissage demain, surtout que la semaine a été quelque peu décousue. Lundi, je n'ai enseigné que l'avant-midi puisque dans l'après-midi, je rencontrais la conseillère pédagogique de mathématique. Marie-Ève, l'orthopédagogue, a donc pris la relève dans ma classe.
Je vous avais dit qu'au début de l'année, ma classe était un réel capharnaüm avec ses centaines de livres épars, ses boîtes non ouvertes traînant un peu partout. Bien, en 2 jours de pédago, j'avais fait de mon mieux, mais lorsque la conseillère a vu l'état de la dite classe, elle n'en revenait pas. Elle a eu la gentillesse de m'aider à déterminer ce qui était le matériel utilisé par la commission scolaire et ce qui était désuet. C'est que j'ai beaucoup de difficulté à jeter...Et là, nous avons jeté quelques sacs à poubelles remplis de choses qui me semblaient encore utiles...Mais bon, ça fait du bien d'être dans une classe où on peut maintenant circuler...(Je crois qu'elle m'a trouvée crottée...mais ça, c'est mon petit côté parano qui ressort...ou pas...).
Donc ménage jusqu'à 6h30 lundi et jusqu'à 7h30 mercredi. Je crois que je fais amplement mes heures!!!

Mardi, c'est notre collègue Laura qui, ne s'étant pas présentée à l'école mardi matin puisqu'elle était malade, en tentant de revenir dans l'après-midi, s'est évanouie et a du être transportée en ambulance jusqu'à la clinique de l'autre côté de la rue. Nous ne savons pas encore ce qui a causé sa maladie, mais l'hypothèse est qu'elle aurait mangé quelque chose qui l'a empoisonnée lundi soir lors d'une fête organisée au village où des mets traditionnels étaient servis (certains à base de graisse de phoque, notamment). Comme son état ne pouvait être soulagé au village, elle est partie le soir en avion vers l'hôpital de Kuujjuaq. Aux dernières nouvelles, elle se porterait mieux et reviendrait au village ce soir. Laura est vraiment une prof et collègue fantastique, nous nous sommes tous inquiétés pour elle et nous souhaitons la revoir le plus rapidement possible, en forme! Nicolas et moi ne regrettons pas d'avoir préféré manger un petit spaghetti peinards à la maison, lundi soir.

Hier, c'était la visite des infirmières qui a bousculé un peu l'horaire prévu. Elles sont venues inspecter la tête de tous, même des profs, à la recherche de ces petites bêtes nommées poux. Et bien, c'est un peu plus que la moitié de ma classe qui n'est pas revenue après le dîner puisqu'ils devaient se faire faire un traitement avant de pouvoir revenir à l'école. J'ai passé à 2 pellicules près de devoir recevoir le shampooing, mais finalement, je suis ok.

Bref, petite semaine étrange, décousue, pleine d'émotions.
Ma bonne humeur est tout de même revenue!
Et...est-ce que Nicolas vous a annoncé la bonne nouvelle? Non?
Alors je lui laisse l'honneur!

À bientôt!
Je vous laisse sur les photos des skippeurs forcés,

lundi 13 septembre 2010

Mélancolie automnale

Bon début de semaine à tous!

Par ici, nous avons eu de belles journées ensoleillées toute la semaine dernière, depuis 2 jours, un petit temps bon pour la mélancolie et le spleen automnal s'est installé; quelques goutelettes de pluie sont même tombées ce matin, ce qui est plutôt rare depuis notre arrivée.

Mon humeur est en symbiose avec la température, je me sens un peu tristounette ces derniers jours sans bien saisir la raison. Ma mère crierait au changement de saison, je me connais assez bien pour ne plus chercher les raisons de mes états d'âme, je tente seulement de les apprivoiser, de vivre avec eux du mieux que je le peux.

Je fais un retour dans le temps pour vous parler de ma journée de vendredi. Avant le dîner, la classe et moi sommes sortis afin de prendre en photos les bâtiments importants du village dans le but de faire ultérieurement un projet en univers social /sciences humaires /géographie, appelez ça comme vous voulez, mois j'appelle ça la matière que je mets à l'horaire quelques fois pour ne pas me faire taper sur les doigts, préférant de loin focusser sur le français et les maths. Ma belle Monica s'étant éclipsée après la récréation, quelle ne fut pas notre surprise de la retrouver recroquevillée sur le côté de l'école...Mes élèves l'ont tout de suite accusée de se cacher pour fumer et, l'un après l'autre, ils sont allés lui sentir les doigts pour valider leur hypothèse...qui s'avérait malheureusement vraie. La voix rauque et les quintes de toux de mon élève de 8-9 ans s'expliquant d'un seul coup!



Nous en avions retrouvé une, mais n'allions pas tarder à en perdre quelques-uns à la Coop, où un arrêt s'imposait puisque ce bâtiment sert d'épicerie, de bureau de poste, de bureau du câble et plus...Mes beaux élèves ont sorti leurs 2 piastres et sont se sont précipités pour acheter chocolat, jus, chips et autres cochonneries. La prof ne savait plus où donner de la tête pour rassembler ses canetons éparpillés et ne respectant pas la règle no 1 de l'école: " pas de cochonneries". J'ai donc intercepté mes élèves à la sortie où les trésors sucrés ont trouvé refuge dans mes poches. Susan s'est donc écroulée par terre en pleurs pour que je lui redonne son bien et moi, sachant que je n'arriverais à rien avec elle, j'ai poursuivi ma route avec les élèves qui étaient prêts. C'est comme ça ici, laisser une élève seule au milieu du village ne constitue pas une grave erreur...J'aurais bien aimé faire autrement, mais c'était la 3e crise de larmes de la journée et la 3e fois où je n'étais pas capable de raisonner les enfants. J'ai donc choisi de donner mon énergie et mon attention à ceux qui le méritaient!



Samedi, après avoir poursuivi le boeuf musqué, je suis retournée à l'école suivre la formation in english sur le bullying or something like that, que je pourrais traduire par intimidation. En avant-midi, rien de révolutionnaire au programme, nous avons entendu parlé de l'intimidation. Par contre, en après-midi, on nous a parlé de l'importance d'enseigner les habiletés sociales à nos élèves. Cela va du simple " J'écoute bien" aux "Je m'introduis dans une conversation", "Je règle un conflit"... Bref, au moins une soixantaine, si ce n'est plus, d'habiletés sociales. Il y également les valeurs qui seront enseignées: la gentillesse, la justice, l'amitié...
J'ai été emballée par la formation car je vois dans cet enseignement quelque chose de concret qui aidera les élèves mais également la communauté. Nous prenons souvent pour acquis que les élèves connaissent ces habiletés pourtant, ici, nous avons sous les yeux des élèves avachis sur les bureau, incapables de prendre un rang en silence ou de poser une question poliment. La formatrice est venue dans ma classe durant une période enseigner "J'écoute bien"; vous auriez du voir les élèves! J'en avais les larmes aux yeux: le corps bien droits, les mains sur le bureau regardant la formatrice dans les yeux et se présentant. Je crois que le fait de revoir ces bases avec les élèves, autant au primaire qu'au secondaire, aidera énormément et les jeunes et les enseignants. Un enseignant est intervenu pour proposer de diffuser à la radio chaque semaine les habiletés sociales et les valeurs afin de mettre les parents dans le coup. Un autre a eu l'idée d'introduire dans le discours dominical à l'église la valeur de la semaine! En voilà du concret qui rassemblera tout le monde! On nous a fourni des affiches, des cartes, bref du matériel qui, je le souhaite de tout coeur, n'amassera pas la poussière durant toute l'année! Oh! Et durant la formation, j'ai même gagné un concours de danse, rien de moins! Une affaire avec le langage non-verbal...Je n'ai pas trop compris le lien, mais je me suis tout de même mérité un sac à dos et le titre de danseuse par excellence de l'école! :)

Marée haute, montant par-dessus notre espace de feu!

Au retour, le temps était magnifique, nous avons donc marché sur la plage à marée basse pour tenter d'amasser des moules. Nous sommes revenus bredouilles, nous devrons donc demandé des trucs aux Inuits que l'on voit revenir avec des sacs plein de ces délices de mer. J'ai fait une petite séance photos pour vous démontrer à quelle point les marées sont impressionnantes par ici.
Marée se retirant graduellement

La marée est à son plus bas; c'est le temps d'aller aux moules ou de piquer au Northern!

Voilà, souhaitez-moi le retour du soleil si ce n'est pas dans le ciel, au moins dans ma tête. D'ici là, je me fais plaisir: jogging, concoctation de biscuits au beurre d'arachides, lettre de chiâlage à ma belle amie Anne...Bref, je suis contente, même dans cette petite baisse d'énergie!

Ps: Je joins deux articles de La Presse lus ce matin en mangeant mon bol. Ces articles parlent du manque cruel de logements au Nunavik. Nicolas et moi n'avons pas constaté cette réalité, pour la simple raison que nous ne sommes jamais entrés dans la maison d'une famille inuite. Cela expliquerait peut-être en partie la grande fatigue de nos élèves; difficile de dormir quand on n'a pas sa chambre, qu'il faut attendre que les adultes se couchent pour installer des matelas dans le salon. On se sent un peu cons d'avoir une belle maison avec une chambre qui ne sert même pas...

http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/national/201009/13/01-4314959-nunavik-les-travailleurs-sociaux-lancent-un-cri-dalarme.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_vous_suggere_4314958_article_POS1


http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/national/201009/13/01-4314958-penurie-de-logements-le-nunavik-a-bout-de-patience.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_BO2_quebec_canada_178_accueil_POS1




samedi 11 septembre 2010

De l'action à Kangi

Bon, Marie m'a quelque peu devancé en publiant ses photos du boeuf musqué sur Facebook, sans doute parce qu'elle était jalouse qu'à titre de remplaçant de service, je n'ai pas à me farcir la pédago du samedi. Être bouche-trou a des avantages, tout de même. Quoique Marie a été touchée et motivée par la formation, qui portait sur l'intimidation (et dont elle vous parlera dans son excellent prochain billet...).

Je commence donc par le récit détaillé de notre aventure matinale avec un boeuf musqué.

Il était encore tôt et, ô surprise, l'auteur de ces lignes, votre humble serviteur, était néanmoins debout et (presque) frais comme une rose. 8h30, un samedi, et j'étais debout. Incroyable mais vrai. Vous pouvez désormais m'appeler Early Bird, et non Grosse Marmotte. Marie était déjà partie à l'école, mais j'ai entendu cogner à la porte. C'était ma belle tigresse qui revenait et, de sa voix criarde elle me dit : "Y'a un boeuf musqué ! Y'a un boeuf musqué !"




Depuis la fenêtre de notre salon, nous apercevions déjà la bête, et nous sommes accourus pour l'observer de plus près. Plusieurs Inuit, dont beaucoup d'enfants, étaient rassemblés autour de l'animal et un homme cherchait à lui faire faire demi-tour. Le boeuf musqué est un drôle d'animal, tout droit sorti, on dirait, de la préhistoire. Un boeuf avec des grosses cornes, un pelage de mammouth et qui court vite pour sa grosseur ! Nous l'avons donc suivi dans ses déambulations dans Kangirsuk. Il s'est immobilisé pendant long moment entre deux maisons, et plusieurs personnes essayaient alors de le chasser en lui lançant des objets (2x4, roches, ou en faisant rouler des pneus jusqu'à lui) et en soulevant les bras pour lui faire peur. Parfois le boeuf faisait mine de charger mais il ne le faisait pas, le seul à reculer étant moi, vous connaissez mon côté Daniel Boom ! Les enfants riaient de ma pleutrerie, il va sans dire... Finalement, au bout d'une bonne demi-heure, le boeuf s'est enfui en direction du dépotoir, quand un Inuit l'a pourchassé en scooter. J'ai filmé l'animal majestueux sur la caméra de Marie (qui était retournée à sa formation), alors pour ceux que ça intéresse, on regardera ça à Noël!



Sinon, ce fut une très belle semaine ! À l'école, ça va mieux ! J'ai presque aimé ça, c'est tout dire. Mais comme une hirondelle ne fait pas le printemps, je ne m'attends pas à ce que ces quatre jours soient garants de l'avenir... Il faut dire aussi que j'ai demandé à mes élèves de faire eux-mêmes les cartons pour notre système de récompenses, et que cette activité nous a pris deux jours entiers... pour faire une douzaine de cartons qui mentionnaient les règles que nous voulons instaurer et le nom des élèves. Ça vous donne une idée de la vitesse à laquelle les jeunes travaillent !
Hier après-midi, il n'y a pas eu d'école, car il y avait une activité en lien avec la journée du suicide, et après celle-ci tous les élèves (primaire et secondaire) ont saisi l'occasion pour se pousser ! Il faut dire que l'autobus était déjà là...

Si j'ai bien compris, cette activité avait lieu dans tous les villages, à la même heure, où il y avait un rassemblement où tous les habitants étaient conviés. Nous nous sommes mis en rond, en nous tenant la main, et les gens ont prié Dieu en leur demandant de leur venir en aide par rapport à ce fléau qu'est le suicide. Comme vous le savez, le taux de suicide au Québec est très élevé, et sans connaître les chiffres je suis presque certain qu'il est encore plus haut ici. En plus, comme la communauté est petite, environ 500 habitants, tout le monde connaît quelqu'un qui s'est déjà enlevé la vie. Quand on sait qu'une personne qui en connaît une autre qui s'est suicidée a je ne sais plus combien de chance d'attenter à sa propre vie, c'est désespérant de penser à la situation qui prévaut vraisemblablement ici. D'ailleurs, j'ai appris cette semaine que les deux parents de l'une de mes élèves se sont suicidés. Ayoye.

Tout ça pour dire que nous formions un grand rond et qu'à tour de rôle, des femmes et des hommes du village se sont mis à prier en Inuktitut. La plupart du temps, ils restaient à leur place mais un homme puis une femme (des pasteurs ?) sont aussi venus au milieu du cercle et ils ont lu des passages de la Bible en Inuktitut. C'était un moment très touchant car à un moment donné, la complainte d'une femme s'est élevée avec plus de force, d'intensité et d'émotion, et une autre femme s'est mise à pleurer en se lamentant, sa plainte formant une sorte de contrepoint aux paroles de la première. La veille, nous avions d'ailleurs eu une discussion avec une prof qui en est à sa quatrième année ici et qui nous disait que les Inuit manifestent peu leurs émotions, sauf lors des funérailles où ils se laissent aller et pleurent tout leur soûl. Je ne sais pas si l'activité d'hier entrait dans la catégorie des "cérémonies" qui servent d'exutoire, mais la femme dont je viens de parler se lamentait d'une manière qui semblait exagérée, comme s'il s'agissait d'une sorte de mise en scène. Je ne dis pas ça négativement, car sa peine était réelle, et les femmes qui se trouvaient autour étaient elles aussi émues jusqu'aux larmes. Et moi aussi ! J'ai seulement eu le sentiment qu'il y avait quelque chose d'exalté dans ses sanglots, comme s'il était permis dans ce contexte d'afficher ses émotions. Quoi qu'il en fût, c'était émouvant de sentir toute cette douleur et de songer qu'ici, comme je le disais précédemment, le suicide semble être un fléau particulièrement dévastateur.

Sur ce, chers amis, je vous laisse car la marée est à son plus bas, alors nous allons tenter d'aller chercher des bonnes moules !

Nicolas XX

mercredi 8 septembre 2010

Du répit (...pour Mélanie!)

Bonjour les amis!

Déjà en plein milieu de cette courte semaine de 4 jours...qui se transformera en une de 5 jours puisque nous avons une pédagogique...samedi! Et oui! Mais c'est pour une bonne cause: partir plus tôt pour les vacances des fêtes! Au calendrier scolaire, nous étions supposés terminer le 22 ou 23 décembre, et comme ici la température a toujours le dernier mot sur les départs et atterrissages des avions, il y avait des chances que nous ne soyions pas dans nos familles à temps pour célébrer le petit Jésus. Donc...4 pédagogiques à faire les soirs ou les fins de semaine. Bon! Il faut ce qu'il faut pour terminer le 17 décembre!

Heureusement, nous avons eu une fin de semaine pour nous reposer! La sortie dans la toundra a été annulée pour cause de vents à écorner les boeufs et de soleil timide. Ce n'est que partie remise! Ce fut bien agréable de rester à la maison à lire et ...lire. Nous nous sommes tout de même secoués à quelques reprises pour aller voir des amis, marcher, courir ou...faire une séance de Josée Lavigueur! Bon...j'ai une photo de ça aussi, mais Nicolas m'a menacé de torture si j'osais mettre ce cliché en ligne! Je me ferai donc violence pour conserver cette succulente photo dans mes dossiers (pssst! Je vous la montrerai à Nowel!).

Sinon, dimanche, nous avons vécu un moment que nous apprécions et attendons toujours impatiemment: la livraison de notre épicerie! C'est notre directrice en personne qui nous a amené notre butin! Nous avons eu le pressentiment que nos denrées arrivaient en sol nordique lorsque l'avion s'est posé sous notre nez lors de notre marche dominicale. Ce fût un grand bonheur de la fin de semaine, en plus que nous avions eu la bonne idée de nous commander du tonic pour boire notre 2e petit verre depuis notre arrivée. Oui, oui, on tète nos réserves, "comme qu'on dirait"!
Mardi, petit retour au boulot pour moi, puisque je rencontrais le conseiller pédagogique en après-midi. Pas besoin de remplaçante, on renvoie les enfants à la maison! Quel ne fut pas mon bonheur d'entendre la déception et les "oh! non!" fuser lorsque j'annonçai la nouvelle à mes élèves. Certains se sont même faufilés dans d'autres classes durant ma rencontre pour rester sous le toit de l'école! Qui a dit que les enfants d'ici n'aimaient pas l'école??? De mon côté, j'ai bien apprécié ma rencontre avec Pascal, le cp, qui m'a aidé à monter des ateliers facilitant la différention auprès des 3e-4e-5e année. Je me suis sentie très fière lorsqu'il m'a dit que j'étais bien bonne, puisqu'offrir un enseignement à des niveaux si différents n'était pas des plus faciles et qu'il n'échangerait pas sa place avec moi...Moi, je l'aime ma place et je ne l'échangerais pas, bien que ce ne soit pas de tout repos tous les jours!  Donc lundi, comme j'étais survoltée, je suis restée très tard à l'école, j'ai traversé déguster le merveilleux repas préparé par Beau Brun et hop! nous avons retraversé la rue pour aller jouer quelques parties de volleyball avec certains profs et Inuits.  Au retour, les aurores dansaient dans le ciel et j'ai tenté de capter ces lumières sur pellicule, mais ce n'est pas bien facile. Voici tout de même le résultat.
En bas, non ce ne sont pas des effets pyrotechniques, seulement les lumières du village captées par mon bras tremblotant. Il était 10h40 lorsque j'ai pris ce cliché et des élèves qui jouaient dans la cour de récréation sont venus me rejoindre...C'est toujours étonnant de voir son élève de 3e année à cette heure tardive, mais bon, je me mêle de mes choses et j'admire les beautés de la nature avec les élèves qui refusent d'aller au lit.

Changement de sujet, Nicolas et moi avons bien rigolé lorsqu'on a attrapé une partie du téléjournal où un appel à tous était lancé pour découvrir les plus belles/plus laides cours de récréation de la métropole. Bien que nous ne faisons pas partie de la grande région de Montréal, nous nous sommes prêtés à l'exercice pour vous faire découvrir notre (affreuse et dangereuse) cour de récréation. Appréciez:

C'est notre maison en bas de la côte. Oui, les fenêtres sont barricadées...

Dans cette cour qui n'en est pas vraiment une, un seul module de jeu (où les filles se battent pour agripper les "Monkey Bars"), des scooters qui filent à vive allure, des jeunes qui montent dans les boîtes de pick-up, et plus, et plus. Il y aurait beaucoup de choses à faire pour favoriser des récréations actives et plaisantes dans un climat plus pacifique. Difficile de s'amuser sainement dans un environnement pareil!

Finalement, aujourd'hui, j'ai puni ma belle Monica qui s'est rendue à 4 crochets en se levant et venant faire des imitations devant la classe pendant que j'enseignais la lettre i, notamment. Donc, la conséquence était de manquer la récréation. Pour ne pas qu'elle associe cette punition à un moment privilégié en tête-à-tête avec moi, je lui ai demandé de coucher sa tête sur son bureau...15 secondes plus tard, elle ronflait! Fatiguée la fille?


Voilà, je termine ici mes nouvelles du nord pour aujourd'hui. Je ne voudrais surtout pas que mon beau m'accuse de passer trop de temps sur les Internet. Mais j'ai tout de même une preuve irrévocable que je ne suis pas la seule attirée par cette bête...(ne m'en tiens pas rigueur, je file tannante aujourd'hui!).


Bon restant de semaine et à bientôt!