lundi 21 mars 2011

Ça se termine en beauté!

En ce lundi matin, je vous écris du confort de ma salle à manger, en pyjama, sirotant mon café! Aaaaahhh...la belle vie de vacanciers! Une semaine juste à nous! Le soleil, comme presque tous les jours, brille de tous ses feux, illuminant la baie toute blanche et gelée. Il fait toujours dans les -20, mais contrairement à ce que je croyais, les températures au-dessus de zéro de la métropole ne me font pas envie. Je préfère la blancheur et la pureté à la slush printanière urbaine.




Des regrets? ...naaaaan!

La dernière semaine en classe a filé à toute vitesse, dans le bonheur, l'apprentissage et la rigueur, oui, oui, la rigueur. En ce début de dernière étape, j'ai guidé les élèves dans une réflexion sur leurs forces et leurs défis. Premièrement, nous avons analysé leur bulletin ensemble, ciblé leurs matières fortes et faibles, relevé leurs jours d'absence. Le niveau de français permet maintenant ce genre de discussions. Certains ont semblé étonnés de constater qu'ils avaient manqué entre 30 et 45 jours d'école sur 60. Heureusement, la majorité n'a manqué qu'une ou deux journées durant l'étape. Le défi de ces élèves "flocons" est évidemment une assiduité plus élevée. J'ai eu la chance de rencontrer leurs parents à la rencontre de remise des bulletins où j'ai tenté de faire passer mon message.

La maman de mon élève le plus absent, celui qui a 13 ans et qui joue au hockey, ne parlant que l'inuktitut, ne s'était jamais présentée à une rencontre. J'ai appris dernièrement qu'elle était la concierge faisant le ménage tous les soirs dans ma classe! J'ai donc assemblé mes notions de base d'inuktitut, et je me suis dirigée vers elle, avec le bulletin et le relevé d'absence.

-"Anahana Bobby ouiouiktitut?" (traduction libre: maman de Bobby en français?)
-"En!" (oui!)
- Bobby no school (graphique des absences à l'appui). Very intelligent but - signe de decrescendo- no school, he forgets the ouiouiktitut.

Dans un anglais approximatif (tout comme le mien!), sa mère m'a fait comprendre qu'il aimerait changer de classe et aller en anglais. Évidemment, ses amis sont dans cette classe. Elle m'a dit que Bobby avait de la difficulté à prononcer les mots de français, chose que je n'ai pas remarquée, en 7 mois d'école! Je lui ai dit que l'an prochain, en passant en 6e, il serait jumelé à la classe de secondaire 1.1 et ainsi, retrouverait certains de ses amis, ce qui a semblé la satisfaire.

J'ai également discuté avec Bobby, qui m'a encore une fois, promis de venir plus souvent à l'école. Ma collègue Mariève a eu l'excellente idée de le jumeler à la classe de 6e année une fois par semaine, pour le préparer au changement de classe, mais surtout, pour lui montrer que nous comprenons son ennui avec les plus petits...
On verra, on verra!

Encore une fois, cette rencontre de parents a été un beau moment de partage et de discussions. La très grande majorité des parents s'est présentée. Ce sont surtout les mamans qui sont venues. Un père est venu puisque sa femme était partie en voyage d'affaires. Il s'est fait un devoir de retranscrire ce que nous lui disions pour le répéter à sa femme. Un couple s'est également présenté. J'étais heureuse puisque ces parents n'étaient pas venus à la 1ère rencontre. Ce sont les parents de mon élève le plus actif pour ne pas dire, hyperactif. J'avais de bonnes nouvelles pour eux, puisque cet enfant est beaucoup plus calme qu'en début d'année. De plus, il réussit assez bien en français et est le luron de la classe. J'ai perçu beaucoup de fierté dans les yeux de ses parents qui m'ont dit qu'ils commençaient à penser que leur fils n'apprendrait jamais le français, après les années difficiles en classe qu'il a vécues. Enfin! Ils entendaient du positif! La maman s'est reconnue dans les difficultés en mathématique de son enfant, elle-même en ayant arraché dans cette matière. Ils ont été très ouverts lorsque je leur ai dit que leur fils manquait un peu trop d'école et ils se sont engagés à aider leur fils à se lever le matin!

Je suis confiante que les 3 derniers mois d'école se dérouleront bien. Les élèves semblent très motivés à profiter de ces mois pour continuer de progresser. De plus, au lendemain et surlendemain de la rencontre des parents, tous mes élèves se sont présentés en classe et ce, dès 9 heures. J'en ressens beaucoup de joie et de fierté!

J'avais prévu les amener chez moi vendredi après-midi pour les récompenser avec un gros snack et un film, mais la pompe à eau de l'école s'est brisée, obligeant l'école à fermer pour des raisons sanitaires. Quelle déception! En plus que le matin, un tournoi de dodgeball était organisé pour les jeunes du primaire. Nous n'avons pas eu l'occasion de nous dire au revoir pour la semaine de relâche. J'espère reprendre mardi prochain, là où nous nous trouvions jeudi, c'est-à-dire, une classe complète et motivée.


La meilleure classe du Nunavik! :)

Le lendemain de la rencontre, mercredi, ma maman nous quittait pour retourner dans son patelin. À 11h00, au milieu de la leçon, j'ai entendu le bruit de l'avion qui décollait, et j'ai pu écraser mon nez dans la fenêtre de la classe, et voir l'avion de ma mère s'envoler au-dessus de la montagne. Je l'ai suivi des yeux jusqu'à temps qu'il ne soit qu'un petit point noir à l'horizon. La chambre d'invités est rangée et prête à recevoir notre prochain visiteur, mon papa. Mes élèves ont bien hâte de rencontrer André!

Ça me fait penser à une chose qui s'est passée en classe, cette semaine. En parlant de l'an prochain, mon élève Annie Ann me demande si nous allons revenir. Toute heureuse, je lui réponds par l'affirmative. Elle me demande si dans 2 ans, nous reviendrons aussi. Je lui réponds alors que bien que je sois très heureuse à Kangirsuk, un jour, je devrai retourner au sud, puisque c'est là que se trouvent les miens, ma famille, mes amis. Ses yeux deviennent tristes et remplis d'incompréhension. Elle me dit que je peux rester ici et que mes parents et amis n'ont qu'à venir me visiter, comme vient de le faire ma maman...J'ai clos la discussion en lui disant que ce serait elle qui viendrait me visiter à Montréal autant de fois qu'elle le voudrait et que je serais toujours heureuse de l'accueillir chez moi, ce qui a semblé la satisfaire. Ils en voient passer des qallunats, les inuit!



La belle Annie Ann, la bouche barbouillée suite à la visite de l'hygiéniste dentaire
Jeudi, nous avons finalement reçu à souper deux ados qui ne cessaient de nous demander si elles pouvaient venir à la maison. Une est en secondaire 1.1 en français, l'autre est en secondaire 2, en anglais. Nous avons appris qu'elles étaient des soeurs biologiques, mais que l'une d'entre elles avait été adoptée à la naissance, par une famille du village. Ces adoptions sont chose commune et fréquente chez les Inuit du Nunavik. Il est parfois difficile de saisir les liens de parenté entre les villageois, mais au bout du 8 mois, nous commençons à en apprendre de plus en plus.
"C'est ta soeur, mais elle n'habite pas chez toi, c'est ça? Vous êtes 6 frères et soeurs, mais 3 habitent dans d'autres villages?"...
C'était très agréable de recevoir ces filles polies et allumées. Nous avons discuté avec elles, leur avons posé des questions sur leur aspirations, leurs rêves. L'une désire travailler comme pilote d'avion, l'autre comme infirmière. Elles désirent aller au collège et revenir ensuite dans leur village. J'espère de tout coeur qu'elles pourront réaliser leur rêve!
Nous leur avons ensuite appris à jouer au Scrabble tout en sirotant des tisanes. L'une des filles est repartie avec des graines à faire germer à la maison puisque durant le souper, elle a beaucoup apprécié les germes amers dans la salade. Elles ont quitté la maison après d'innombrables remerciements!

Voilà!
Je retourne à ma liste de choses à faire durant la semaine de relâche: lire, regarder des dvd, magasiner des sacs d'école pour les élèves sur Internet, nourrir le chat, le chien, les plantes des collègues partis dans leurs patelins, marcher, m'entraîner, profiter du soleil, écouter la radio, faire des siestes.
Ah que la vie est douce pour moi!

Je vous embrasse et vous laisse sur quelques photos.
Samedi matin, je souligne le début de la relâche par un bain de soleil derrière la maison

Visite de l'hygiéniste dentaire
 
On s'habille pour une ride en ski-doo. Conclusion: nous ne sommes pas très téméraires...



Retour des ski-doo sur la baie
Coucher de soleil et parhélie, à gauche du soleil




La salle de gym, en haut de l'aréna. Le dimanche, les enseignants s'y rassemblent pour pédaler, courir et se faire des gros muscles! 



Les corbeaux (ou corneilles?) se posent désormais sur les glaces...

Un brin de relaxation, en observant le paysage!


3 commentaires:

Anonyme a dit…

Marie, je suis trop fière de toi.
Tu es ma Marina Orsini.

Rose

Josianne a dit…

Quel beau billet plein de fierté et de petites victoires. La photo de ta classe nombreuse et assidue dans un rayon de soleil est adorable.
Tu ne leur avais pas encore dit tes intentions de rester une autre année ? C'est sûrement rare des profs qui restent 2 ans... Bravo ma soeur Marina, moi aussi je suis fière de toi.
Je vous aime, bonne relâche xox

Anna a dit…

aaaah je vis beaucoup beaucoup d'incertitudes ces jours-ci et tu me donnes une grosse bouffée d'air pour continuer..